Andre Cymone a accordé une interview marathon de 2 heures et demi à Michael Dean pour The Prince podcast.

L’intégralité est en écoute et est téléchargeable sur Podcastjuice net:

 

André n’élude aucune question et revient sur toutes les étapes clés de sa carrière et de son histoire personnelle.

Pour ceux qui ne sont pas bilingues, ou pour ceux que la durée rebute, un petit compte-rendu sur les sujets abordés :

Sa jeunesse et ses parents

André a grandi dans une cité au nord de Minneapolis. Sa mère, Bernadette, occupait une place importante dans la communauté de par ses activités sociales. Son père, Fred, était bassiste à ses heures. André s’initie à la musique avec sa sœur Linda. Il écoute beaucoup les Beatles et les groupes « à message ». Il s’essaye aux cuivres, à la basse et s’entraine sur une guitare à 4 cordes qu’il a réussi à récupérer. Il rencontre Prince à l’école. Peu de temps après, il rencontre son père, John Nelson. Ils découvrent alors, grâce à une photo, que Fred Anderson, jouait déjà dans un groupe mené par le père de Prince quelques années auparavant.

Au cours de l’interview, André revient à quelques reprises sur John Nelson. Il parle de ses talents incroyables de pianiste (« To this day, he’s one of the most amazing piano player I’ve ever seen in my life ») et de son éthique (« He would preach to us and play piano at the same time »). Ce n’est pas par hasard si Prince et lui sont devenus des bourreaux du travail (il leur disait « If you wanna be the best, you got to play, you gotta practrice »).

 

Grand Central

Avec Prince, ils forment un groupe. Sa soeur Linda Anderson est aux synthés, Terry Jackson et William Doughty aux percussions, Charles Smith (aka Chazz Smith), cousin de Prince est à la batterie. Chazz étant l’ainé, il était de fait, le leader du groupe. André raconte avec beaucoup d’humour les premiers noms du groupe que Chazz pouvaient changer du jour au lendemain sans prévenir personne. Le groupe se produisait dans des fêtes et des concours locaux. Un soir, ils ont découvert qu’ils s’appelaient Charles ‘ Cousin & Friends, puis People’s Church. Un soir où ils pensaient jouer sous le nom de Soul Explosion dans un concours de groupes locaux, ils perdent face à un autre groupe qui s’appelle Phoenix. André et Prince étaient déçus, jusqu’à ce que Chazz leur annonce qu’en fait, non. Ce soir là, ils ne s’appelaient pas Soul Explosion, mais Phoenix. Il les avait rebaptisé la veille et inscrit le groupe sous ce nom à ce concours. Prince rebaptise une bonne fois pour toute le groupe en tant Grand Central, en double référence au lycée qu’ils fréquentaient (Central High School) et au groupe Grand Funk Railroad.

Après quelques temps, Chazz est viré du groupe. En tant qu’ainé, c’est lui qui recevait l’argent lorsque le groupe se produisait dans des fêtes et réceptions ou lorsqu’ils gagnaient des concours locaux. Mais il oubliait de payer les autres membres du groupe. Lassé, André le remplace sans ménagement par un certain Morris Day, qui lui tenait la jambe depuis quelques mois pour intégrer le groupe. Morris avait l’avantage d’avoir un tempérament facile, d’avoir son propre matériel (et une basse qu’il a donné à André), mais aussi une très jolie maman (« aussi belle que Pam Grier ») qui prend en charge les affaires du groupe.

Grand Central

Parmi les groupes locaux qui faisaient concurrence à Grand Central, André cite The Family, composé des frères Lewis (aucun lien avec Terry), Sonny Thompson (futur Sonny T.) et une section de cuivres. A l’époque, parmi tous les groupes émergeants, c’était LE groupe (« We were no good until we were better than them »), tant par leurs talents que par leurs styles (« le batteur avait une afro incroyable »). Les frères Lewis & Sonny T. sortiront un album sous le nom de ‘Lewis Con(n)ection‘.

Wishing on a star

Après un show, André se souvient avoir vu une étoile filante et souhaité que le groupe ait du succès. Lorsque ces groupes s’affrontaient musicalement, ils pouvaient être récompensés financièrement, en nature ou en heures de studio offertes. Le groupe rencontre alors Chris Moon, propriétaire du Moonsound, qui deviendra le Sound 80. Prince travaille de plus en plus souvent avec lui, la plupart du temps sans le groupe qui se rebaptise Shampayne. André raconte  qu’il n’était pas déçu que Prince soit favorisé par rapport à lui ou aux autres membres du groupe. Sa philosophie étant « si ça peut marcher pour toi, fonce » (à aucun moment Pepe Willie et 94 East ne sont abordés dans cette interview).

André intègre en toute logique le groupe de Prince pour ses premiers concerts. Dans cette interview, il relate (à 1h06) un événement jusque là inconnu et jamais documenté : Avant de faire la première partie de Rick James (Fire It Up Tour en 1980, avant la sortie de « Dirty Mind »), Prince et son groupe sont invités à faire la première partie d’un concert de Kool & The Gang au Circle Star Theatre de San Carlos, prés de San Francisco (en janvier 1980).  André déclare que c’est après ce concert qu’ils ont rencontré Sheila E.

Circle Star 1980

Source : Princevault.

 

Prince et son groupe ont volé la vedette à Kool & The Gang, tant sur scène que backstage (avec les groupies). Le Gang n’a pas voulu continuer la tournée avec eux, ne souhaitant pas que cela se reproduise dans les autres villes. Rick James prendra ce risque, à ses dépends. André raconte comment peu à peu, Prince et son groupe ont conquis les foules, au point qu’après son set, des fans quittaient la salle pour les suivre backstage ou à l’extérieur. Il parle aussi des sources de tensions avec Rick James à cette époque (James visait Prince et Cymone avec un faux pistolet – Love gun – pendant qu’ils jouaient, des mauvaises blagues du coté de Cymone…) et de leur réconciliation plusieurs années plus tard.

 

Andre 1979

« Different end of the spectrum »

C’est au Palace, à Paris (juin 81) qu’André fera son dernier concert en tant que bassiste pour Prince. Il envisageait déjà de quitter le groupe depuis le début de l’année (avant leur performance au Saturday Night Live), mais sa mère l’en a dissuadé.

Durant son séjour parisien, Cymone verra un groupe français à la télé qui l’impressionnera (nous avons cherché sans succès sur le forum à qui pouvait faire référence André) par ses costumes et ce qu’il dégageait.  Ça l’inspire, et veut créer quelque chose dans le genre. Il en parle à sa sœur Sylvia (responsable des costumes de scène de Prince et son entourage), et, à son grand regret, à Prince lui-même (« my problem was that : I told Prince »). Ayant déjà un contrat chez Warner, et Morris espérant toujours faire partie d’un groupe, Prince se réapproprie le sujet. Certaines des chansons données au groupe ressemblent un peu trop, au goût d’André, à des jams qu’ils faisaient ensemble (« not exactly the same, but very similar »). Et ces emprunts ne se sont pas limités au premier album de The Time visiblement (il cite ‘Do Me, Baby’ et ‘Let’s Work’). André se sentant quelque peu floué, étouffé artistiquement, ne recevant pas de crédits pour ses contributions, vivant encore chez sa mère alors que Prince commence un vivre dans un certain confort (« I can’t even take my girl to the movies », « I made the last part of the tour for free, I was straight broke »), il décide de mettre fin à leur collaboration musicale et de voler de ses propres ailes.

Hasta la vista, Baby

André signe avec Columbia pour faire non pas un album à la The Time, mais pour être un black-Beatle. Il était l’un des rares musiciens à avoir un synthétiseur analogique/numérique de la marque PPG, qui lui permettait d’obtenir des sonorités futuristes. Il sort son premier album « Livin’ In The Wave » en 1982, mais des désaccord sur la conception de ce disque avec Columbia selon lui et la promotion associée (La maison de disque le voyait plutôt comme un artiste R&B) handicaperont le succès du disque. « Survivin’ In The 80’s », l’année suivante aura le même destin.

Pendant cette période, il promotionne ces albums comme il peut. Les journalistes tentant de monter en épingle sa « rivalité » avec Prince. Ce dernier  donnera tout de même la chanson « The Dance Electric » à André pour son troisième album « AC » sorti en 1985. Ce sera l’unique tube d’André Cymone en solo. Dans une rare interview accordée à MTV, Prince explique ce geste d’une façon qu’André a trouvé humiliante sur le coup. Cela ne l’empêche pas de monter sur scène avec lui à quelques occasions sur le Hit & Run Tour de 1986, lorsqu’il était dans le coin, pour interpréter « Dance Electric ».

C’est pendant le tournage de la vidéo de cette chanson, qu’il rencontre le management de Jody Watley, qui venait de quitter Shalamar pour faire une carrière solo. Comme beaucoup d’autres artistes au milieu des années 80, Jody n’était pas contre une petite touche de Minneapolis Sound pour son prochain album. Il avait travaillé avec Evelyn Champagne King auparavant. André accepte de travailler avec elle. L’album éponyme de Jody Watley sort début 87. Il se hisse à la première place des charts R&B et les 5 singles auront du succès. 3 autres albums suivront (« Larger Than Life » en 89, « Affairs Of The Heart » en 91 et « Intimacy » en 93, plus un album de remixes) avec un impact moindre. André est de plus en plus sollicité en tant que producteur (Adam & The Ants, Jermaine Stewart, Tom Jones, Tina Turner, Pebbles, la B.O. du flic de Beverly Hills 2), mais il refuse de faire des albums complets comme il l’a fait pour Watley, pour ne pas se répéter. Il ne s’épanche pas trop sur cette période malheureusement (Jody et lui ont divorcé en 1998). Dans l’interview, il se montre très critique vis-a-vis des producteurs actuels qui n’ont pas de personnalité, d’identité, ou qui ne respectent pas la musique, l’Histoire au sens large (ceux qui se permettent de faire des blagues sur Martin Luther King) et qui ne véhiculent que des messages stupides ou des valeurs négatives.

 

The Stone

Comme vous le savez sûrement, André a sorti son album solo en janvier dernier : The Stone. Les critiques ont été plutôt positives, même si beaucoup ont été surpris par le parti-pris Rock and roll de l’album. André assure qu’il a encore beaucoup de chansons en réserve dans un style purement minneapolitain (« Minneapolis Funk ») proche de celui de The Time ou Shampayne. Il pense les offrir à ceux qui ont participé au financement de son album (via pledge). Il ne dit pas qu’il va sortir des inédits des ces projets cependant (The Time et Shampayne), mais une photo de bandes qu’il a retrouvé nous laisse quand même un petit espoir.

Shampayne

 Bernadette The Lady

L’interview n’aborde pas la période où Prince a été hébergé par la famille Anderson. Par contre, André évoque les derniers moments de sa mère. Bernadette Anderson sera hospitalisée aux débuts des années 2000 (elle décédera en 2003). C’est pendant cette hospitalisation que Prince et André reprendront contact. Prince, Larry Graham et sa femme Tina ayant rendu visite à Bernadette à l’hôpital. Le soir même, le personnel déplace Bernadette, sans prévenir ses proches, vers une chambre plus grande (craignant que l’annonce d’une visite régulière de la part de Prince ne cause des problèmes de sécurité visiblement). Ce déplacement aurait été fatal à Bernadette.

 

On en parle sur le forum